À première vue, une boîte de puzzle signée Jan van Haasteren ressemble à un simple divertissement. Mais dès que l’on soulève le couvercle, c’est un monde entier qui s’ouvre, délirant, grouillant de détails absurdes, de personnages burlesques, de gags visuels et de clins d’œil récurrents. Jan van Haasteren, c’est un univers à part, devenu culte chez les passionnés de puzzles. Loin du paysage bucolique ou de la scène de Noël classique, ses puzzles explosent d’énergie et racontent mille histoires simultanément. Ce n’est pas une simple distraction. C’est une chasse aux trésors permanente.
Un style reconnaissable entre mille
Ce qui distingue immédiatement un puzzle Jan van Haasteren, c’est son style graphique unique, hérité directement de la bande dessinée. Lignes noires franches, visages expressifs à la limite de la caricature, composition saturée : on est loin de l’esthétique paisible de la majorité des puzzles traditionnels. Ici, chaque centimètre carré regorge d’action. Une équipe de rugby affronte des chiens de traîneau, un requin traverse le sol comme si c’était de l’eau, un plongeur atterrit au beau milieu d’un supermarché. C’est un joyeux chaos organisé, pensé dans les moindres détails. Et ces détails sont précisément ce qui transforme chaque séance de puzzle en une expérience comique et immersive.
Cette densité visuelle s’accompagne de personnages récurrents que les fans apprennent à reconnaître : le policier moustachu, la grand-mère déchaînée, le petit vieux malicieux, ou encore le fameux requin. Ces éléments sont volontairement dissimulés d’un puzzle à l’autre, comme autant de balises pour les initiés. C’est ce qui transforme une simple activité en rituel collectif : une fois qu’on a repéré le requin, la partie commence vraiment.
Le studio derrière la folie
Jan van Haasteren ne travaille plus seul depuis 2013. Face à la demande croissante, il a initié la création d’un studio composé d’illustrateurs capables de reproduire son style tout en injectant leur propre humour et créativité. Parmi eux, Rob Derks, Dick Heins, Mars Gremmen ou encore Wilma van den Bosch. Le studio fonctionne en réseau — pas de QG, mais une coordination à distance, chaque dessinateur travaillant depuis son atelier personnel. Cette diversité de plumes, supervisée dans l’esprit de Jan, permet aujourd’hui de produire jusqu’à 8 puzzles originaux par an, sans dilution de l’identité visuelle ni perte d’humour.
Certains puristes préfèrent les originaux de Jan. D’autres, au contraire, apprécient les variantes apportées par les nouveaux talents. Ce qui est indéniable, c’est que la transition vers un travail collectif a sauvé la marque d’un engorgement créatif et permis son expansion à l’international.
Un puzzle, plusieurs lectures
Faire un Jan van Haasteren, ce n’est pas seulement emboîter des pièces, c’est observer, fouiller, rire. Une première lecture permet de comprendre la scène générale — un aéroport, un mariage, un musée. Une seconde révèle des situations absurdes : un pingouin au rayon poissonnerie, un judoka qui combat un ours en peluche, un facteur poursuivi par une horde de chats. Puis viennent les micro-histoires, parfois sur quelques pièces seulement : un enfant fait une bêtise, un scientifique explose son laboratoire, un personnage traverse discrètement plusieurs scènes sans jamais interagir avec les autres.
Ce foisonnement rend chaque puzzle rejouable. Même après plusieurs reconstitutions, on continue à découvrir de nouveaux détails. C’est une rareté dans le monde du puzzle, où la majorité des modèles ne supportent qu’un usage unique avant de finir échangés ou rangés.
Pour qui sont faits les Jan van Haasteren ?
Ce ne sont pas des puzzles pour amateurs d’ambiances zen. Ceux qui aiment trier les pièces par couleurs et se reposer sur des lignes d’horizon claires risquent d’être frustrés. Ici, tout est méli-mélo, et la logique se niche dans les répétitions de motifs, les vêtements des personnages ou les objets incongrus. C’est un défi d’un autre type : moins basé sur la patience, plus sur l’attention visuelle et la mémoire des gags.
Ce qui n’empêche pas les enfants de s’y essayer. Certaines éditions spéciales, comme les puzzles 150 ou 500 pièces, permettent une première immersion sans y passer 12 heures. Mais le cœur du public reste les adultes fans d’humour absurde, les nostalgiques de la BD franco-belge, et les joueurs en quête de contenu interactif au-delà du simple emboîtement.
Un phénomène culturel
Avec plus de 200 puzzles à son actif, des éditions spéciales XXL (jusqu’à 30 000 pièces en format collectif), une base de fans internationaux et une boutique dédiée, Jan van Haasteren a franchi depuis longtemps les frontières du simple produit de loisir. C’est un univers transmédia, prolongé par des expositions (comme en 2023 au Stadsmuseum Harderwijk), des compétitions officielles (le Championnat néerlandais de puzzle inclut souvent un Jan van Haasteren), et une communauté ultra-active, notamment aux Pays-Bas et en Allemagne.
Des sites entiers recensent les gags récurrents, listent les apparitions du requin ou identifient les clins d’œil à d’autres puzzles. Une base de données communautaire est même disponible pour les collectionneurs souhaitant compléter leur série, traquer les variantes ou repérer les rééditions.
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